L’inauguration du rond-point s’est tenue le 19 février 2022
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Présentation
Dans le contexte anxiogène et fragilisant de la crise sanitaire actuelle, il est important de garder un certain élan afin d’éclaircir et élargir notre horizon loin de la morosité ambiante.
Le rond-point des tortues des maures, projet fédérateur né d’un riche partenariat entre la ville de Carnoules et le Centre Hospitalier Henri Guérin de Pierrefeu-du-Var, se veut le reflet de cette volonté d’aller de l’avant dans un désir constructif et novateur.
Dans le cadre de sa mission de santé publique et des orientations actuelles de la psychiatrie, le Centre Hospitalier Henri Guérin, développe depuis plusieurs années de multiples projets de réhabilitations tournés vers la cité dans un souci d’humanisation, de bien-être et d’adaptation du soin au plus près de la population varoise.
Grâce, entre autre, à des conventions passées avec les villes de Carnoules, de Pierrefeu-du-Var et plus récemment avec la communauté d’agglomération de la Provence Verte, des projets culturels et thérapeutiques portés par des équipes pluridisciplinaires : soignants, travailleurs sociaux, art-thérapeutes voient le jour, contribuant ainsi à créer des liens et de nouvelles pratiques destinées à optimiser et proposer une offre de soin variée.
Comme le disait si justement Fenelon : “Dans tous les âges l’exemple a un pouvoir étonnant ; dans l’enfance, l’exemple peut tout.”
Espérons que l’exemple que ces enfants nous donnent à voir à travers l’oeuvre collective qu’ils nous offrent, contribue à entretenir cette dynamique d’ouverture pour une meilleure reconnaissance des personnes en souffrance psychique.
Jean-Marie CARTEREAU, Responsable Culturel au C.H Henri Guérin, Pierrefeu-du-Var
Genèse
En janvier 2019, Lors d’un échange informel avec monsieur Christian David, Maire de la commune de Carnoules, nous avions évoqué l’aménagement du rond-point situé la sortie de Carnoules en direction de la ville de Pignans.
A proximité de ce rond-point réside le Village des Tortues. Le Village des Tortues de Carnoules Coeur-du-Var est un centre pédagogique et de conservation unique en son genre, destiné à la protection des tortues. Il abrite les activités scientifiques et de conservation de l’association SOPTOM, ainsi qu’un centre de soin pour les tortues.
La commune de Carnoules ayant la charge de la décoration du rond-point, monsieur David me fit part de son idée d’agrémenter cet ouvrage d’une sculpture représentant une tortue pour faire écho à la présence proche du Village des Tortues.
L’Atelier d’Art du CH Henri Guérin inscrit au même moment dans un projet similaire de création d’une sculpture de tortue avec les enfants de l’Hôpital de Jour l’Oasis à Saint Maximin (structure dépendante du Centre Hospitalier Henri Guérin), j’ai proposé de créer des passerelles entre ces deux propositions pour en faire un seul et même projet.
Ceci dans une dynamique fédératrice analogue à celui réalisé il y a quelques années par notre Atelier d’Art sur le rond-point du Dixmude à Cuers avec la création de la sculpture monumentale « L’envol » avec la collaboration active de l’A.I.A (Base Aéronavale) de Cuers-Pierrefeu.
D’autre part, une des missions des ateliers d’expressions du CH Henri Guérin étant de lutter contre la stigmatisation des personnes souffrant de troubles psychiques ou psychologiques, ce projet à la fois artistique et thérapeutique incluant enfants hospitalisés et enfants issus de la commune de Carnoules, nous a paru un bel exemple de mixité sociale et « d’acceptation de l’autre » contribuant ainsi à « désenclaver » une fois de plus la psychiatrie en développant et renforçant de nouveaux liens vers la cité.
A partir de 2020, suite à une convention culturelle passée entre les deux partenaires : Le Centre Hospitalier de Pierrefeu-du-Var et la Commune de Carnoules, plusieurs ateliers d’expression avec les enfants se sont déroulés dans deux lieux : Ecole Primaire de Carnoules, Atelier d’Art intra-muros au Centre Hospitalier de Pierrefeu, afin de créer les éléments nécessaires à la réalisation d’une décoration murale en céramique sur le thème des « Tortues des Maures » et destinée à être installée sur les supports muraux du rond-point.
Parallèlement à ce travail, des réalisations graphiques et picturales sont venues ponctuer ces ateliers afin de sensibiliser les enfants aux problèmes de conservation de la faune et de la flore de la plaine des Maures. Ces dernières réalisations feront ultérieurement l’objet d’une exposition, témoignant ainsi de l’investissement des enfants tout au long de ces deux années d’échanges complices.
Au moment, où j’écris ces quelques lignes un terrible incendie vient de ravager la plaine des Maures et causer d’irrémédiables dégâts en particulier pour les tortues d’Hermann déjà menacées de disparition.
Dans ce contexte particulier, cette aventure commune d’enfants d’horizons divers qui, jusqu’ici n’avait pas ou que peu eu l’occasion de se rencontrer et de se découvrir, est un symbole fort de ce que l’expression peut délivrer comme message d’espoir et de renouveau à travers une pulsion de vie créative. Gageons, que dans l’avenir les graines semées dans ce terreau fertile contribueront à servir la cause d’une psychiatrie humaniste et plus ouverte sur la cité.
Jean-Marie CARTEREAU, Responsable Culturel au CH Henri Guérin, Pierrefeu-du-Var
« On va au projet tortue », projet de sculpture monumentale pour l’aménagement d’un rond-point sur la commune de Carnoules
Atelier d’Art – Hôpital de jour Enfants de Saint-Maximin – CH Henri Guérin
« Rien ne sert de courir, il faut partir à point », nous rappelle Jean de La Fontaine à travers sa fable qui illustre par ailleurs, souvenons-nous, que nous associons en France et en Europe la tortue à la lenteur. La tortue, cet animal préhistorique à la peau épaisse et résistante, qui grandit dès son éclosion, fermement soudée à sa carapace. Celle-ci ornée d’écailles aux formes géométriques et symétriques, sera sa garantie de survie, sa protection, sa défense, son refuge. En cas de danger véritable ou face à une situation qui lui est inconnue, la tortue, pour se protéger, ramène ses membres sous elle et rétracte sa tête. Ainsi immobile, figée, elle donne l’impression de laisser glisser les aléas du monde par-dessus sa carapace et d’attendre avec une imperturbable patience que le danger se dissipe, que ça passe.
La temporalité de la tortue ne semble donc pas s’inscrire dans l’immédiateté mais dans une imperturbable patience qui ne la détourne pas pour autant de son chemin. Car, à nouveau en sécurité et en confiance, elle ressort sa tête, du dedans au dehors, de l’obscurité à la lumière, pour avancer, découvrir et explorer son existence. Nous pouvons nous imaginer qu’avec chaque expérience gagnée, le champ du possible s’agrandit pour la tortue, attisant de plus en plus sa curiosité.
Ces alternances, entre avancement et suspension, entre ouverture au monde, à l’autre et repli sur soi se laissent non seulement transposer sur la temporalité psychique singulière de chacun mais aussi sur la temporalité du soin. Le soin, dont nous attendons souvent hélas des effets immédiats, nous enseigne bien souvent la nécessité de la patience afin de prendre en compte la temporalité psychique et non-linéaire du sujet et dans notre cas, de l’enfant et de sa famille.
A l’Hôpital de Jour « L’Oasis », les journées sont rythmées en fonction des projets de soin des enfants, élaborés en équipe pluridisciplinaire.
Le temps du soin s’inscrit ainsi dans une continuité et un cadre stable, repérant dans la régularité sécurisante d’une semaine sur l’autre.
Pour permettre notre participation au projet de la réalisation d’une décoration murale en céramique sur le thème des « Tortues des Maures », il était nécessaire de déroger aux plannings habituels et de rompre par moment avec le quotidien du soin, dans la mesure où les rencontres se faisaient de manière ponctuelle, même si elles se poursuivaient dans le temps. Cela dans une volonté d’aller au dehors des murs de l’Hôpital de Jour, d’aller vers l’extérieur pour créer des ouvertures, permettre un partage authentique entre enfants et soignants d’expérience nouvelle.
Bien que les créations se soient faites à partir d’un thème, d’une consigne ou encore d’une proposition technique, il était toujours laissé aux enfants la liberté d’expression. Cela non pas dans une recherche d’esthétique mais avant tout dans le développement d’une expression singulière grâce à l’art.
Ce projet à la fois artistique et thérapeutique semblerait avoir permis aux enfants d’entrer dans l’univers de l’artiste, un univers où ils ont été accueillis non pas comme porteurs de difficultés pouvant entraver leur implication dans le projet mais avant tout en tant qu’enfants-artistes. C’est ainsi que les enfants se sont trouvés par exemple des qualités de « graphiste » ou encore de « coloriste », des nouveaux points d’identification leur permettant d’attraper quelque chose de leur être, à l’écart du poids d’une possible stigmatisation.
Du côté des soignants, ces rencontres artistiques permettent de rencontrer les enfants dans un autre contexte, sous un autre regard, de s’apercevoir de l’évolution de l’enfant dans ce cadre propice aux surprises.
Cette expérience nous a montré l’importance et le rôle de la médiation en tant que telle mais aussi de l’art, tous deux dans leur capacité à produire du sens et à dégager des nouvelles perspectives pour les enfants et les équipes professionnelles.
Ce projet en partenariat avec l’Atelier d’Art montre la richesse de la pluridisciplinarité dans l’accueil des patients et nous espérons que d’autres projets verront le jour.
Sina Domning, Psychologue clinicienne au CH Henri Guérin, Pierrefeu-du-Var
Presse et médias
Printemps 2022 – Bulletin d’information municipale « Vivre à Carnoules » numéro 51
21/02 – Les tortues des Maures ont leur rond-point – VAR MATIN